Appel à la défense de l’avenir des psychologues de l’orientation professionnelle au sein de Pôle Emploi

En tant que Syndicat National des Psychologues, représentant la profession de psychologue, nous avons accompagné le transfert de plus de 750 psychologues du travail AFPA vers Pôle Emploi, et ce, jusqu’à la signature de l’accord d’adaptation signé le 18 juin 2010. Nous sommes pourtant obligés aujourd’hui de faire le constat du non respect flagrant par Pôle Emploi de son engagement et devoir conventionnel au niveau national envers nos confrères : doter ses psychologues des moyens nécessaires pour respecter leur contrat de travail, en particulier les règles professionnelles édictées dans notre code de déontologie 1996 et la charte européenne des psychologues (chap.2 – art. 3 de l’accord conventionnel du 18 juin 2010).

En effet, nous sommes conduits, avec la plus grande stupéfaction, par les nombreuses alertes de nos confrères et instances chargées de les représenter (CHSCT, médecin du travail, Organisations Syndicales, rapport RPS,…), et ce sur l’ensemble du territoire national, à faire les constats suivants :

• Remise en cause unilatérale et complète par Pôle Emploi, un an après la signature de l’accord national collectif conventionnel, des garanties institutionnelles de conservation du titre de Psychologue, de son statut cadre et des moyens nécessaires à l’exercice de ses règles professionnelles (code de déontologie 1996).
La négociation de nouvelles grilles de classification fait disparaitre, en effet, l’intitulé d’emploi « Psychologue du travail» des emplois « repères » pour mener à bien la mission d’orientation vers la formation. Cette méthode de «pesée» des emplois proposée à la négociation par l’institution prétend, de plus, scinder le savoir-faire global des psychologues en compétences dissociables au mépris de la reconnaissance de la qualification de haut niveau universitaire et de la responsabilité personnelle des psychologues assumée face aux usagers, y compris en cas de litige devant un tribunal. Pôle Emploi ne respecte pas, se faisant, la directive du conseil de la concurrence, ayant ordonné le transfert des personnels AFPA (sans qu’ils ne puissent, d’ailleurs, se représenter eux-mêmes dans leur nouvelle institution!) pour qu’ils puissent effectuer la même mission de service d’intérêt général au sein de Pôle Emploi. Cette méthode de classification proposée dénie, en fait, le savoir-faire global des psychologues pour effectuer leur mission, la responsabilité et la qualification ainsi que la fiabilité de leur avis et de leur expertise en ce qui concerne la construction et la mise en œuvre de cette mission d’intérêt général au sein du Service Public de l’Emploi français.

• Refus par certaines directions régionales et remise en cause nationale par le référentiel REPERE, de la mise à disposition de bureaux d’entretiens et locaux fermés suffisamment insonorisés, indispensables à la pratique d’interventions psychologiques, afin de pouvoir garantir aux personnes un cadre de confidentialité comme l’exige ce principe fondamental du code de déontologie (Titre I – 1/ respect des droits de la personne ainsi que l’article 15). Pôle Emploi enfreint donc le code du travail qui l’oblige pourtant à respecter son propre cadre conventionnel : il impose à ses psychologues par des locaux inadaptés d’enfreindre non seulement leurs règles professionnelles (code de déontologie) mais également l’engagement contractuel qui les lie. De plus, cette remise en cause de la confidentialité et du principe de non divulgation des informations issues des interventions d’orientation professionnelle enfreint un des principes de l’Orientation Educative conforme à la direction européenne de « l’Orientation tout au long de la vie » dans laquelle la France est engagée. En effet, tout comme la garantie du bon investissement formation de l’argent public, la garantie d’amélioration des capacités des personnes à s’orienter ne peut être délivrée que dans un contexte organisationnel exempt de menace et contrainte telle que la suppression ou suspension de minima sociaux. Aussi, dans le contexte de fusion des métiers de l’accompagnement et de l’indemnisation sous-jacent à la création de Pôle emploi, l’existence d’un personnel uniquement dédié à l’Orientation Professionnelle constitué par le corps professionnel des ATO (Agent Technique d’Orientation) soumis au secret professionnel, est nécessaire afin de prolonger ces garanties de non divulgation des informations issues d’interventions psychologiques au cadre organisationnel pour tous les EOS et garantir ainsi l’étanchéité des services d’Orientation spécialisés (EOS).

• Déstabilisation professionnelle générale (engendrée par ces 2 premiers points) et nuisances de cette organisation de travail et/ou management générant une souffrance au travail importante pour nos confrères. Cette souffrance est plus particulièrement mise en lumière par un rapport d’expertise en risques psychosociaux (Midi Pyrénées), des alertes de CHSCT ou de médecins du travail, des communiqués nationaux de diverses organisations syndicales,… Sans que nous ayons eu accès aux données officielles de Pôle Emploi sur le taux d’absentéisme (maladie longue durée, handicap,…) ou même démissions, les éléments d’alerte mis à notre connaissance sont suffisamment inquiétants et révélateurs de la maltraitance institutionnelle infligée aux équipes d’orientation transférées de l’AFPA.

Il est donc nécessaire pour notre syndicat professionnel de confirmer à tous nos confrères de Pôle Emploi notre complète opposition à la dégradation de leur cadre d’exercice au sein du service public de l’emploi à l’occasion de ce transfert aux conséquences particulièrement anxiogènes et délétères au niveau de la santé au travail par rapport à laquelle, pourtant, tout employeur à un objectif de résultat (article L.230-2 du code du travail). Nous dénonçons, au nom de notre profession et de la protection des publics pour laquelle nous œuvrons, des menaces supplémentaires qui pèsent sur la reconnaissance de la profession (grille de classification en cours de négociation) alors même que la prévention primaire de la santé au travail que constitue cette branche d’exercice de l’Orientation Professionnelle est réellement cruciale dans le contexte socio-économique actuel. Les conditions de travail imposées à nos confrères au sein de Pôle Emploi sont fondamentalement nuisibles socialement car elles dégradent durablement le service d’intérêt général dû à la population si fragile et vulnérable des demandeurs d’orientation et de formation.

Cette situation organisationnelle nationale subie par les Equipes d’Orientation Spécialisées montre l’absence flagrante d’organisation du travail reconnaissant et permettant, comme à l’AFPA, le respect de nos règles déontologiques dans cette nouvelle institution du Service Public de l’Emploi. L’absence de dialogue, de collectif de travail entre pairs et d’une instance de dialogue et de travail collectif national sur des bases scientifiques nécessaires pour la ligne Orientation Professionnelle et Formation empêchent assurément les usagers de Pôle Emploi de bénéficier réellement de l’expertise et l’expérience de ses psychologues du travail. Ainsi, la valeur ajoutée de nos savoir-faire et de nos conditions déontologiques d’exercice, garantissant la performance sociale et socio-économique nécessaire à la réussite de « l’Orientation Tout au Long de la Vie » dans une logique durable et responsable socialement est mésestimée et non prise en compte dans l’organisation actuelle de pôle Emploi.

Nous appelons donc l’ensemble de nos confrères exerçant à Pôle Emploi à faire valoir et à faire respecter leurs droits individuels et collectifs par toutes instances ou toutes actions susceptibles de les faire valoir auprès de leur employeur comme bon nombre d’équipes locales et/ou régionales et collègues à titre individuel l’ont déjà fait. Nous soutiendrons toute action amiable ou non pour créer au sein de leur nouvelle institution un réel cadre d’exercice propice à nos règles professionnelles déontologiques et à l’avenir de la profession, pour le respect et la reconnaissance de la personne (usagers et psychologue lui-même) dans sa dimension psychique; reconnaissance qui fonde l’action de tout psychologue.

Pour le Syndicat National des Psychologues,
le 2 Octobre 2011

Valérie CHENARD,
Secrétaire de la commission du champ du travail SNP

Destinataires pour diffusion :

– Psychologues du travail et personnels transférés vers Pole Emploi au 1° Avril 2010

– Organisations syndicales nationales de Pole Emploi

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